
A chaque nouveau dossier qui atterrit sur son bureau, la règle est toujours la même. “On vérifie que le médicament répond à un besoin médical avéré, puis on évalue s’il est techniquement possible de le développer en France ou en Europe. Si on est sûr à 85%, on fonce”, détaille Thierry Hoffmann, directeur général des Laboratoires Delbert. Depuis neuf ans, cette société pharmaceutique intelligente basée à Paris vient en aide à d’anciens médicaments essentiels menacés de disparition. “En neuf ans, nous en avons ramené une quinzaine à la vie. C’est un grand succès.”poursuit-il fièrement.
Tout a commencé en 2013, lorsque le pharmacien industriel Thierry Hoffman et le psychiatre Mark Childs ont fait sauter leur tirelire pour racheter Delbert Laboratories. “Au cours de notre carrière professionnelle, nous avons été choqués de voir de grandes sociétés pharmaceutiques retirer d’anciens médicaments encore très efficaces et nécessaires pour certains patients, soit parce qu’ils ne sont plus assez rentables, soit à cause de difficultés de fabrication.”, dit Hoffmann. Le duo se lance alors un défi : racheter de vieux médicaments à Big Pharma pour leur donner un second souffle.
Dans le processus, les deux partenaires ont commencé à compiler une liste de produits à risque, en identifiant soigneusement les médicaments critiques qui étaient régulièrement en rupture de stock ou abandonnés.
Souveraineté des soins de santé
En 2014, ils ont commencé leur premier effort de sauvetage en achetant un traitement contre la polycythémie vraie (un patient fabriquant trop de globules rouges) auprès de la société américaine Abbott Vercyte. aucune autre solution n’est disponible. “Le fournisseur de matières premières a décidé d’arrêter la production pour des raisons financières. A l’époque, 2 000 patients français étaient traités avec ce produit et risquaient de mourir s’il disparaissait.”observe Hoffmann.
Les équipes Delbert ont ensuite procédé à une refonte complète du produit de A à Z, de la synthèse du principe actif à la production du produit fini. La tâche n’est pas aisée, car la molécule Vercyte est un dérivé du gaz de guerre pipebrome, que peu de fabricants ont la capacité de manipuler. A ce défi s’ajoute une autre contrainte que le laboratoire s’est imposée à son lancement : déplacer au maximum la production de médicaments vers le sol français ou européen afin de garantir la souveraineté sanitaire. Contre vents et marées, le labo parvient à trouver un expert en chimie fine en France, puis fait appel à Delpharm, un industriel lillois, pour fabriquer le produit fini.
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