Le couple France-Allemagne bat de l’aile, voici pourquoi

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Emmanuel Macron et Olaf Scholz, ici au sommet du G7 de mai 2022 à Berlin, se retrouvent pour un déjeuner de travail à l’Elysée.

DIPLOMATIE – Paris et Berlin ont dû passer de ” Dans une relation avec “ à « C’est compliqué » donc tout le monde s’en mêle. La mauvaise passe que traverse le couple franco-allemand ne déroge pas à la règle : comme dans toutes les histoires d’amour célèbres, chacun a son mot à dire.

Il y a celles comme Marine Le Pen qui jouent le rôle de l’amie indélicate, racontant à l’une des inquiètes qu’elle n’a jamais cru à cette idylle. ” Emmanuel Macron suit constamment l’Allemagne, mais l’Allemagne ne suit pas Emmanuel Macron. Défense, industrie, énergie… L’annulation du sommet franco-allemand montre, on l’a découvert, qu’il y a beaucoup de désaccords”, tweeté président du RN. D’autres, comme le PS, accusent l’un des deux partis d’être à l’origine de l’aliénation. ” Les récentes critiques de l’Allemagne restent soit inquiétantes, soit étonnantes “, disait par exemple le premier secrétaire d’Olivier Faure à la tribune de Le monde.

Même du côté de l’acteur de ce ” histoire d’amour », la réconciliation commence à émerger. ” Il n’y a pas d’alternative à cette alliance car nous représentons environ 40% du produit intérieur brut européen et nous sommes liés par des liens historiques très profonds. Personne ne devrait en douter “, a déclaré ce vendredi Bruno Le Maire dans une interview pour Frankfurter Allgemeine Zeitung, en référence à éviter ” mots offensants entre nos deux pays “.

Mais comment en sommes-nous arrivés là ? Un point sur la brouille persistante qui a sa source dans la guerre en Ukraine et qui amène le couple à l’ultime étape avant la rupture : le report du traditionnel conseil ministériel franco-allemand initialement prévu le mercredi 26 octobre. Il a été remplacé par un simple déjeuner de travail à l’Elysée où Emmanuel Macron a reçu le chancelier Olaf Scholz sans communiqué de presse prévu.

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Une guerre qui change tout

Le 24 février, la Russie déclenche une guerre contre l’Ukraine. Cela a des conséquences énormes en Europe, en termes de sécurité et d’énergie. Pour l’Allemagne, c’est tout un logiciel de réflexion qu’il faut repenser, car il dépend à la fois des Etats-Unis sur le plan sécuritaire et de la Russie sur le plan énergétique. Et pour cause, avant l’invasion menée par Vladimir Poutine, le gaz russe représentait pas moins de 55 % des importations allemandes. Cela plaça Berlin dans une position délicate et, selon certains, provoqua une petite crise d’orgueil outre-Rhin.

Pendant des années, les Allemands ont fait les mauvais choix, notamment en matière d’énergie et de défense. Aujourd’hui, alors que tout évolue rapidement, la situation tend à donner raison aux attitudes traditionnelles de la France. C’est intolérable pour les Allemands qui veulent rester les patrons. Leur nomenclature militaro-diplomatique est dirigée contre la France, bien plus que la population, observer dans Opinion Jean-Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman.

De fait, la France et l’Allemagne, qui se considèrent comme les forces motrices de l’Union européenne, ont multiplié leurs positions différentes.

Ces choix stratégiques qui font chanter Paris

Il n’y a pas d’amour sans preuve d’amour. Et compte tenu des dernières décisions stratégiques de Berlin, Paris a effectivement des raisons de se sentir délaissée. Peu après le déclenchement de la guerre en Ukraine, l’Allemagne a annoncé la modernisation de ses outils de défense, à travers la création d’un fonds spécial de 100 milliards d’euros.

D’abord perçu favorablement depuis Paris, où l’on pense que la France ne pourra durablement assurer le rôle de seule puissance militaire de l’UE, cet effort va vite décevoir. Et pour cause, les Allemands se sont surtout tournés vers les Etats-Unis pour s’équiper (notamment pour l’aviation), alors qu’Emmanuel Macron a longtemps prôné la souveraineté européenne en matière de défense, dans un contexte où l’Allemagne rechigne à prendre la seconde place devant la défense industrielle franco-allemande. projets, tels que l’avion et le char du futur (Scaf et MGCS).

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Un Paris tendu, qui, comme un conjoint, remarque les premiers signes d’éloignement, a confirmé ses craintes. Le 14 octobre, Olaf Scholz a lancé le projet de bouclier antimissile, s’associant à 14 pays membres de l’OTAN. Un appareil doté d’équipements allemands, américains et israéliens, qui éloigne davantage les projets européens de défense promus par Emmanuel Macron. Ce qui, sans surprise, a été perçu comme une violation à Paris.

Parentalité et mauvais comportement

En plus de ces différences de sécurité, il existe également des divisions économiques. Début octobre, l’Allemagne a annoncé – sans prévenir la France – un plan de soutien à son économie de 200 milliards d’euros face à la hausse des prix de l’énergie. Ce qui, encore une fois, est mal perçu en France, où la pression s’exerce pour une plus grande solidarité européenne face à la crise. Dans ÉchosEmmanuel Macron, qui se dit agacé d’être mis devant le fait accompli, a lui-même critiqué le possible ” effet déstabilisant” que ce plan pourrait provoquer en Europe.

D’autant plus que cette relance, qui augmente les dépenses allemandes, se passe dans le pays le plus difficile en termes de déficit parmi les autres membres de l’UE. En amont du Conseil européen de jeudi, le chef de l’Etat a publiquement haussé le ton à propos de Berlin, estimant que “Ce n’est bon ni pour l’Allemagne ni pour l’Europe qu’elle s’isole”. D’autant plus que d’autres divergences se préparent, cette fois en termes d’énergie.

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Du côté allemand, on considère que le nucléaire n’est pas l’énergie du futur, alors que Paris considère au contraire qu’il est nécessaire dans le mix énergétique qui vise à aboutir à une économie décarbonée. Deux approches opposées qui ont des conséquences, notamment pour le marché européen de l’électricité, sur lequel la France et l’Allemagne expriment leur désaccord.

A Paris, elle prône un plafonnement du prix du gaz utilisé pour produire de l’électricité, ce que rejette Berlin, qui – compte tenu de sa dépendance au gaz – y voit un risque d’approvisionnement, craignant que le prix maximum n’incite les producteurs à abandonner le marché européen. Qu’importe, Emmanuel Macron s’est engagé à négocier sur ce sujet avec d’autres pays européens.

Résultat : des tensions qui montent et un couple qui enchaîne les disputes, aussi diplomatiques soient-elles. ” La France est notre alliée la plus proche ” et ” les relations sont tout à fait correctes », a commenté le porte-parole du gouvernement allemand ce vendredi lors d’une conférence de presse, alors que (aussi) la réunion parlementaire à laquelle les deux pays étaient présents a été annulée.

Il y a eu beaucoup de spéculations ces derniers jours, mais la plupart d’entre elles sont infondées. “Ce même porte-parole a assuré, comme s’il voulait relativiser l’effondrement.” Mercredi prochain, Emmanuel Macron recevra Olaf Scholz à Paris. Une occasion pour les deux dirigeants de recoller les morceaux et de donner une chance à une relation qui a été sérieusement mise à mal.

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