Planteurs d’Avenir se donne trente ans pour couvrir la France de haies

Pour l’instant, ce ne sont que quelques poignées de graines qui dorment dans les réfrigérateurs. Mais ils portent en eux une renaissance, pour ne pas dire une petite révolution agronomique. Au printemps prochain, ces graines d’une vingtaine de types d’arbustes seront placées dans des pots et leurs semis seront enracinés dans des terres agricoles. Bientôt, ils formeront une façade végétale dense et colorée, qui s’étendra sur des kilomètres et des kilomètres, enserrant les champs comme un long mur organique. C’est ce qu’on appelle le bocage de la haie.

« Nous participons au sens de l’histoire ! », s’enthousiasme Matthias Gajar, l’un des leaders du projet appelé Planters of the Future, qui a collecté ces graines, les a fait germer et s’apprête à les planter. C’est bien l’histoire avec un “H” majuscule (pour “haie”) que Planteurs d’Avenir espère écrire dans sa première pépinière, ouverte en début d’année, à Martiac (Gironde), au coeur du Pessac. -Région viticole de Léognan. Les trois premiers paysagistes rémunérés de l’association sont en cours d’embauche. ” Nous espérons ouvrir quatre autres crèches comme celle-ci à travers la France dans l’année à venirexplique Mathias Gaillard, ingénieur agronome diplômé d’AgroParisTech. A terme, chacun d’eux devrait produire 100 000 plants par an. »

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Ce qui ira carrément sur les terres agricoles françaises, qui en ont bien besoin. Parce que les haies de boca ne sont pas que de beaux compagnons pour les promeneurs : elles sont indispensables aux écosystèmes agricoles. “Premièrement, ils captent naturellement le CO.”2. De plus, ils renforcent le sol, qui devient plus résistant à l’érosion et aux glissements de terrain, contribuent à un meilleur cycle de l’eau, à un meilleur équilibre des micro-organismes souterrains, notamment les champignons. Ils sont aussi bons pour la biodiversité animale – oiseaux, insectes, chauves-souris… Enfin, bien sélectionnés, ils peuvent protéger naturellement les cultures de certains ravageurs »précise Maxime de Rostolan, ingénieur et serial entrepreneur vert qui a eu l’idée des Planteurs d’Avenir (ayant fondé Fermes d’Avenir pour aider les réfugiés à s’insérer dans le monde agricole, ou le “lobby citoyen” La Bascule, ou la voile coopérative de transport maritime Sailcoop).

Travailler pendant au moins trente ans

Bref, les haies sont utiles à tous les niveaux. La question est : pourquoi disparaissent-ils ? Car l’agriculture intensive, depuis 1950, a eu la mauvaise idée d’en éradiquer la moitié (nous racontons cette histoire ici). Il continue de détruire plus de 10 000 kilomètres par an pour créer de plus grandes parcelles mécanisées – mais les machines n’aiment pas les haies qui les empêchent de travailler…

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“En plus de lutter spécifiquement contre le réchauffement climatique, il faudrait replanter 750 000 km de haies dans les trente prochaines années.” De ce constat nous avons créé Planteurs d’Avenir qui travaille depuis au moins trente ans ! », souligne Maxime de Rostolan. Qui n’avait rien d’autre à faire que de menacer l’État de poursuites judiciaires pour le mettre en demeure d’agir.

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“La France, qui a signé les accords de Paris.” [à l’issue de la COP21, NDLR] s’est engagé à réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais n’a pas atteint ses objectifs. Le tribunal administratif a ordonné au gouvernement de proposer un plan crédible pour capturer 15 mégatonnes de CO2 question en excès. Toutefois, le ministère de l’Agriculture [époque Julien Denormandie] prétendait qu’il n’y avait aucun moyen technique pour cela. Nous lui avons rappelé que cet outil existe depuis longtemps et qu’il s’appelle une haie de bocage ! »

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Petits revenus pour les paysans

Reçu à plusieurs reprises à l’Élysée, Maxime de Rostolan a décroché une première bourse de 185 000 euros de l’Office français de la biodiversité, complétée de la même somme par ses partenaires privés (Clarens, Bouigues, etc.). Il lui reste maintenant à créer un réseau de pépinières qui se fera un honneur de ne travailler qu’à partir d’espèces végétales locales – le bocage des Bouches du Rhône n’est pas celui de l’Oasis, qui n’est pas le Médoc…

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Surtout, il lui reste à convaincre le monde agricole de l’intérêt de traverser des zones cultivées avec des milliers de kilomètres de haies. “Je suis un optimiste. On voit notamment que le monde du vin ici, dans la région bordelaise, prend conscience de l’importance d’y revenir, lorsqu’il connaît des épisodes de gel, de sécheresse, etc. », témoigne Matias Gajar. Surtout sur modèle d’affaires de Planteurs d’Avenir a une bonne idée pour procurer un petit revenu aux agriculteurs qui seraient tentés de ressusciter le bocage : la haie est vraiment un crédit carbone, le bois peut être vendu, les fruits… « Autant de sources de revenus auxquelles il faut ajouter la possibilité de développer l’écotourisme », soutenu par Mathias Gaillard. Il faudra au moins cela pour remettre l’agriculture française sur les rails.



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