
Le rappel et la demande cinglants du représentant spécial et chef du Bureau régional des Nations unies pour l’Afrique centrale (UNOCA) ne peuvent être sous-estimés. A huit mois de la prochaine élection présidentielle, ils ont une résonance toute particulière.

A huit mois de l’échéance, la demande du chef de l’Unoca reflète la réalité : dans les milieux diplomatiques, la crédibilité de la prochaine élection présidentielle est déjà en cause. (Sur la photo, une scène de violence après les élections de 2016). © Edité par Gabonreview
C’est une pierre jetée dans le jardin d’Ali Bongo. Présentant son rapport le 8 du mois en cours devant le Conseil de sécurité, le représentant spécial et chef du Bureau régional des Nations unies pour l’Afrique centrale (UNOCA) a invité la communauté internationale à «tirer les leçons des récentes élections pour mieux se préparer aux événements futurs.” Se souvenir “que les dernières élections (…) (au Gabon) marqué par la violence“, a plaidé pour”soutien international (…) assurer des processus électoraux pacifiques.” Si ce rappel cinglant ne peut être sous-estimé, cette demande est très pertinente. A huit mois de l’échéance, elle reflète la réalité : dans les milieux diplomatiques, la crédibilité de la prochaine élection présidentielle est déjà en cause.
Observation indépendante légitime
En août 2016, la Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOE-UE) avait en effet confirmé :renforcer le cadre électoral« est la condition sine qua non de la crédibilité de l’élection présidentielle de 2023. A tout le moins, c’est nécessaire »renforcer le rôle (…) (l’autorité responsable des élections) en adoptant un règlement intérieur qui détermine ses domaines de compétence, les modalités de prise de décisions et leur mise en œuvre», « renforcer (le sien) indépendance (…) en l’étendant à tous les éléments politiques concurrents (…) (pendant l’hébergement) leur représentation paritaire», examiner la liste électorale», «mettre en place un système de centralisation transparent (permettant de garantir) traçabilité à chaque minute“et,”réviser le Règlement de la Cour constitutionnelle.” Au-delà, il faut aussiintégrer le rôle de l’observation nationale et internationale dans la législation nationale“définir”statut (Autoriser) garantir les droits des observateurs nationaux et internationaux.”
Depuis le début de l’année en cours, certaines forces sociales se sont fait l’écho de ces recommandations. Partis politiques ou organisations de la société civile, ils réclament une réforme du système électoral, exigeant la légalisation de l’observation indépendante. Hélas… Clairement persuadé qu’il a le soutien de la Centrale électorale gabonaise (CGE) et de la Cour constitutionnelle, le gouvernement refuse de donner suite à ces appels, se vautrant dans un silence éloquent. Clairement gagné à l’idée de violence, il préfère fléchir ses muscles, quitte à étaler sa force, comme lors du défilé militaire du 17 août. Dans un tel contexte, les préoccupations d’Abdou Abarry sont faciles à comprendre et à expliquer.
La cohésion sociale n’est pas l’euphorie
Sauf à faire preuve d’irresponsabilité, personne ne peut croire à une élection présidentielle apaisée dans les conditions actuelles. À moins d’avoir des arrière-pensées, personne ne gagne en réduisant les risques qui lui sont posés. Comme le lien de confiance entre gouvernants et gouvernés, comme la crédibilité des institutions, la cohésion sociale n’est pas affaire d’euphorie. Ces éléments sont nourris par une idée : la légitimité démocratique. En d’autres termes, des élections transparentes, justes et inclusives sont une garantie du fonctionnement harmonieux de l’État et de la société. S’ils permettent de prédire l’avenir avec confiance, ils offrent des garanties aux investisseurs. Au contraire, l’achat de voix, la manipulation des chiffres, la partialité des instances chargées des élections ou l’intervention des militaires dans la vie politique est un sujet de tension ou pire encore.
Comme l’ont récemment confirmé les signataires du Mémorandum pour la réforme du système électoral national,le refus de (tout amendement) cela pourrait conduire le pays à des tensions aux conséquences incommensurables.” Alors l’appel à “soutien international.” Pour apprécier le sens et la portée de la demande d’Abdou Barry, il faut se souvenir de l’élection présidentielle de 2016, marquée notamment par la suppression de 21 bureaux de vote, qui a été la prise d’otage de la province du Haut-Ogo.
oui, une parodie de procès et, l’attentat du siège de Jean Ping… Traumatisme à bien des égards, ce vaudeville ne se rejoue pas. Pour ainsi dire, le Gabon n’a rien à gagner à snober la demande d’un représentant spécial et du patron de l’Unoca. Au contraire. Il ferait un travail utile en lui donnant une suite. Si on l’imagine mal faire confiance aux Nations unies pour organiser ou surveiller la prochaine élection présidentielle, il peut toujours choisir l’observation électorale ou l’assistance technique. Il peut même faire appel à l’Union européenne ou au Commonwealth. Ne pas en décider reviendrait à confirmer la volonté du pouvoir en place de faire comme toujours, quitte à déconstruire davantage une société déjà ébranlée dans ses fondements.